Printemps 2006 : Premier dépôt au CNC

Je fais d’abord lire mon scénario à quelques amis. En général, les réactions sont bonnes mais rarement enthousiastes, ce qui, évidemment, me déçoit un peu. Malgré tout, il semble y avoir du progrès par rapport à mes anciens travaux puisque mon ami critique de cinéma, Gilles Esposito, me dit devant la cinémathèque de Chaillot : « Il y a des problèmes mais c’est quand même plus intéressant que tes précédents scripts. »

Je laisse pendant tout le printemps mon scénario de côté et travaille à la production d’un court métrage d’art contemporain. Je rencontre alors Guilhem Amesland, le premier assistant du film, ancien élève producteur à la FEMIS. Nous sympathisons et je lui passe mon scénario. A la fin d’une pénible réunion de travail, il me dit sur le pas de la porte qu’il a lu La République et qu’il est très étonné : il trouve le projet excellent et m’encourage à l’envoyer au CNC et me propose même de me présenter des producteurs susceptibles d’être intéressés par le projet.

Je vais donc au Quartier Latin quelques jours plus tard fabriquer mes huit dossiers et les dépose au mois de mai sans trop y croire, ayant systématiquement échoué à chacune de mes tentatives pour faire financer un court métrage par une institution publique.

Pourtant au début de l’été, le CNC me téléphone : mon projet a passé le premier tour de la contribution financière pour le court métrage. J’aurai une réponse définitive au mois d’octobre.

Automne 2006 : Aide au programme ?

Au mois d’octobre, j’appelle le CNC et une jeune femme m’annonce que je suis ajourné et que mon projet n’a finalement pas été retenu. Je mets un bon mois à me remettre de cette nouvelle déception et en fais part à Guilhem qui me propose de me présenter un jeune producteur, camarade de promotion, qui pourrait malgré tout m’aider car il m’apprend que certains producteurs reçoivent une sorte d’aide automatique du CNC qui leur permet de produire les films de leurs choix, indépendamment du jury de la contribution financière : c’est ce qu’on appelle l’aide au programme.

Je rencontre ce producteur lors d’une soirée et lui envoie mon scénario dans la foulée. Il le lit très rapidement et me rappelle. Nous avons une discussion très longue et, pour moi très intéressante : il loue les qualités d’écriture du scénario mais m’avoue ne pas croire en ce type de projet. La politique dans le cinéma français, il n’y croit pas et trouve le projet finalement trop risqué. Il ne me suivra pas sur ce film-là mais m’assure qu’il lira avec attention mes prochains scénarios.

Il me faut donc maintenant trouver un producteur susceptible de bénéficier de cette fameuse aide au programme, qui me semble pour le moment indispensable à la réalisation de mon projet. Je me souviens alors que mon amie Axelle Ropert a obtenu cette aide pour son moyen métrage Étoile Violette et lui envoie mon scénario en lui demandant si elle ne peut pas me faire rencontrer son producteur David Thion, qui a reçu au moins cette aide dans le passé et, qui sait, l’a peut être encore en 2006. Axelle aime beaucoup le scénario, ce qui est un grand encouragement pour moi et me met en relation avec David Thion qui, malheureusement, ne produit plus que des longs métrages. Une nouvelle fois, un producteur loue les qualités d’écriture du projet mais décide de ne pas me suivre pour ce film. Néanmoins, il m’apprend qu’ayant passé le premier tour de la contribution financière, je peux de nouveau présenter mon scénario au CNC.


Hiver 2006 / Printemps 2007 : 2000 euros cash

Me revoilà donc au Quartier Latin, à réimprimer et relier mes huit dossiers afin de redéposer mon projet.

Au mois de mars, un e-mail du CNC m’apprend que mon scénario a, une nouvelle fois, passé le premier tour et que je suis, une nouvelle fois, admis en commission plénière. La composition de la commission n’ayant pas changé, je ne crois pas du tout en mes chances et suis, un peu dépité, la campagne de l’élection présidentielle de 2007.

Pourtant, peu après l’élection de Nicolas Sarkozy, le réalisateur Stéphane Brizé me téléphone et me donne une bonne nouvelle : la commission plénière a beaucoup discuté de mon projet et a décidé de me donner une nouvelle chance : j’obtiens une aide à la réécriture de 2000 euros et dois représenter mon projet dans les douze mois.

Autre bonne nouvelle : l’élection présidentielle de 2007 me donne l’idée d’un scénario de comédie politique, Le jour où Ségolène a gagné, que Canal Plus aime beaucoup et que je réaliserai un an plus tard environ.

Pendant tout l’été 2007 et une partie de l’automne, je réécris cette comédie, et mets de côté pour quelques mois La République que je dois achever pour le mois de mars 2008.

Printemps 2008 : Veni, vidi, vinci

Au mois de mai, Stéphane Brizé m’avait avoué que mon aide à la réécriture ne m’avait pas été allouée parce qu’on pensait véritablement que je devais réécrire mon projet. Cette décision était un compromis entre une moitié de la commission qui aimait mon scénario tel quel et une moitié qui le détestait et qui le détesterait tout autant une fois remanié (certains se demandaient pourquoi j’avais écrit un scénario sur Alain Juppé, d’autres avaient l’impression de lire la transcription d’une émission de radio).

Il fallait pourtant que je réécrive mon scénario et que je le modifie suffisamment pour justifier l’aide de 2000 euros que m’avait allouée le CNC. J’avais vu tous les films qui m’intéressaient, j’étais un peu à court d’idées. En plus, je pensais à mon autre projet que je devais tourner à la rentrée 2008.

Je relus donc plusieurs romans politiques de Balzac, notamment Une ténébreuse affaire, quelques polars, notamment La Clé de verre de Dashiell Hammett qui parle beaucoup de stratégie et un peu de politique, et la quasi totalité des livres de John Le Carré dont l’univers froid, ingrat, gris, inquiétant me donna une nouvelle piste. Je développais aussi le personnage de la femme de François ainsi que celui de la journaliste. Alors que je pensais que ma deuxième version était définitive, je terminais cette troisième version au printemps en ayant la nette impression que mon scénario s’était vraiment enrichi.

Je le renvoyais donc une nouvelle fois au CNC en ayant principalement en tête les problèmes de casting de mon premier court métrage Le Jour où Ségolène a gagné que je devais tourner quelques mois plus tard.

Entre temps, mon scénario avait tellement traîné dans diverses commissions, sociétés de productions, avait tellement été lu par des amis et leurs amis, qu’un matin, un jeune producteur me téléphone, il s’appelle Julien Naveau. Son nom me dit quelque chose, en faisant une recherche Google pendant qu’il me parle, je m’aperçois qu’il est un des interprètes du film Les Cinéphiles 3 de Louis Skorecki que je viens de voir. Nous nous rencontrons aux bureaux de Noodles Productions. Il me parle dès ce premier rendez-vous très intelligemment du projet et est, de très loin, la personne le plus motivé par le film depuis le début de ma recherche de producteur. Il se battra dorénavant à mes côtés pour que le film soit à la hauteur de ses ambitions.

Enfin, en avril 2008, un coup de fil m’annonce que le CNC a finalement décidé d’attribuer à La République sa contribution financière. A priori, le film se fera dans un délai d’un an (il faut que je finisse mon premier film et que le reste du financement de La République se mette en place peu à peu).

 

Septembre 2008 : financement

La République est un court métrage cher et le financement du CNC ne suffira pas à boucler son budget. Les trois principaux « guichets » de financement pour un court métrage en France sont : le CNC, les collectivités territoriales et les télévisions qui préachètent les films avant qu’ils soient tournés. Dans notre cas, il faudra faire carton plein si nous voulons tourner le scénario écrit.

Fin septembre, Julien Naveau et moi nous retrouvons devant le jury de la région Champagne-Ardenne à Châlons-en-Champagne. Nous avons rendez-vous au bureau du film, qui se trouve dans un hôtel particulier érigé dans la rue la plus riche de France, au milieu des sièges sociaux des plus grandes marques de Champagne. Je sens assez rapidement que le scénario a plu et que mon intervention se passe bien. Je suis très fier du moment où je parle de mes campagnes électorales pour les élections des délégués de classe lors desquelles, entre 11 et 15 ans, je tentais de battre des records de démagogie auprès de mes camarades. Quelques jours plus tard, nous apprenons que la région aidera le film et que, par conséquent, nous tournerons dans sa plus grande ville, à Reims – ce qui tombe bien puisque c’est la ville où étaient sacrés les rois de France (je suis d’ailleurs très heureux que la scène où le héros du film, François, comprend que son ami Roger va devenir Président de la République se déroule à l’arrière de la cathédrale d’où sortaient les rois de France une fois couronnés).

À la fin de l’année, nous apprenons que France 2 est également intéressé par La République. Après un rendez-vous avec Christophe Taudière au siège de France Télévision, Julien m’apprend que nous avons effectivement fait carton plein et que tous les financements dont nous avions besoin vont nous être alloués. Julien doit peaufiner le devis du film, mais, a priori, je n’aurai rien à sacrifier dans la mise en œuvre du projet.

 

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